La vielle

vielle à roue vielle à roue

Informations supplémentaires

  • Famille: corde & clavier
  • Particularité: roue & bourdons

La vielle à roue est le seul instrument à cordes et à clavier, dont la roue sert d'archet. C'est aussi le seul instrument à bourdons possédant une rythmique (percussion).

Elle se compose :

  • D'un clavier comprenant les sautereaux qui permettent d'obtenir les différentes notes désirées,
  • D'un cheviller portant auparavant les chevilles en bois qui tendaient les cordes et permettaient ainsi d'accorder l'instrument avec un petit outil en bois appelé tourne-à-gauche. Actuellement, dans la lutherie moderne les chevilles sont remplacées par un système de mécaniques de type guitare,
  • D'une table d'harmonie comprenant entre autre les ouïes, le chevalet, le cordier, la roue et le couvre roue,
  • D'une caisse de résonance sur laquelle est attachée la manivelle qui actionne la roue,
  • De 6 cordes, en général:
    • 4 cordes libres, à note continue, qui donnent l'accompagnement :
      • la mouche (tout petit bourdon)
      • le petit bourdon
      • le grand bourdon
      • la trompette, qui est aussi le système percussif de l'instrument.
    • 2 cordes mélodiques, les chanterelles.
    • Selon l'instrument, on peut aussi avoir des cordes sympathiques: ce sont des cordes libres, sur lesquelles on n'exerce aucune action, mais qui entrent en vibrations par simple résonance — par sympathie — avec les notes jouées de même hauteur (fréquence).

Selon les langues, la vielle à roue se nomme tout à fait différemment. En français vielle à roue, en Italien ghironda, Zanfona en Espagnol, draailier en Néerlandais, drehleier en Allemand, hurdy-gurdy en Anglais, ninera en tchèque, symphony en danois... et tiesse di dj'vâ en wallon. Ce dernier nom proviendrait de la ressemblance de l'instrument avec la tête d'un cheval.

Fonctionnement de l'instrument.

La vielle à roue combine trois éléments musicaux : la mélodie, l'harmonie et le rythme. De par la présence de la roue archet, le principe de la vielle a été expliqué comme celui de "l'archet infini".

Pour obtenir un premier son, il faut actionner la roue à l'aide de la poignée et de la manivelle, ce qui a pour effet de faire vibrer les cordes posées sur la roue. Pour obtenir la mélodie, on agit sur les deux chanterelles par les touches du clavier, lequel est de type chromatique sur deux octaves. Lorsqu'on enfonce une touche, les sautereaux, qui sont à l'intérieur du clavier, raccourcissent la longueur vibrante de la corde (comme les doigts sur le manche d'une guitare).

Les cordes dites "gros bourdon"," petit bourdon" et "mouche" émettent un son continu et créent ainsi l'harmonie.

Un bourdon spécial, dit "trompette", permet d'accompagner la mélodie de rythme : cette corde repose sur un chevalet en porte à faux, très mobile (le chien), qui vibre sur la table d'harmonie lorsque des impulsions rythmiques sont données à la roue par l'intermédiaire de la manivelle (dits "coups de poignet" ou "coups de poignée").

C'est cette technique qui est la plus difficile à apprendre, car elle demande une grande précision et une synchronisation de la main droite qui exécute le "coup de poignée" avec la main gauche exécutant la mélodie. Par exemple, dans une mesure en 3/4, un tour de manivelle correspond à une noire et, pour chaque note, un coup de poignée doit être donné... Actuellement, le jeu de vielle moderne laisse plus le libre choix aux vielleux qui peuvent même jouer un rythme tout à fait personnalisé.

Les mauvaises langues disent qu'un joueur de vielle passe la moitié de son temps à accorder son instrument, et l'autre moitié de son temps à jouer faux !

Un peu d'histoire:

La manivelle de la vielle à roue est une réalisation tout à fait particulière au niveau musical. En soi, la manivelle proprement dite est une des plus importantes inventions et réalisations de la technique médiévale. C'est pourquoi l'invention du système de la vielle à roue apparaît comme s'inscrivant dans le cadre plus général de la technologie médiévale. Cet instrument pourrait donc bien dater de l'époque médiévale et il semblerait que l'origine la plus vraisemblable serait la cour d'Espagne, lieu où s'échangeaient beaucoup les cultures orientales (les musiques de ces régions utilisaient aussi les techniques de bourdon) et occidentales.

L'ancêtre de la veille à roue s'appelait l'Organistrum : c'était un instrument joué par deux personnes : l'une tournait la roue, l'autre poussait ou tirait les touches. Il était utilisé essentiellement dans l'interprétation de musiques sacrées (en accompagnement de chants liturgiques). L'organistrum a été renseigné dès le début du Xème siècle par Odon de Cluny (moine bénédictin qui fut de 926 à 942 le second abbé de Cluny).On en trouve des représentations en Espagne (à Saint Jacques de Compostelle) et dans le Nord de l'Europe.

C'est au début du XIIIème siècle que l'organistrum subit une importante mutation, il fut raccourci pour permettre à un seul musicien d'en jouer. Ainsi naquit la symphonia, cet instrument servant surtout à l'interprétation de musiques que l'on qualifie de savantes.

Toutefois l'évolution de la musique savante ne permit plus longtemps à la vielle et à sa diaphonie d'accompagner les nouvelles polyphonies naissantes qui exigeaient des modulations incompatibles avec les tenues des instruments à bourdon. La symphonia fut alors détrônée par l'orgue qui accompagnait de plus en plus les chants religieux.

C'est ainsi que dans le courant du XIIIème siècle, et avec quelques modifications, La symphonia devient la chiffonie et se voit récupérée par des musiciens ambulants, des aveugles, des truands...Elle trouve ainsi, tout naturellement, sa place parmi les instruments des ménestrels.

Au XVIIe siècle, seul le milieu populaire conserve l'usage de la vielle. L'instrument sert à faire danser, à créer une musique de fond lors de repas de fête par exemple ou encore à accompagner le chant du joueur qui est soit un musicien normalement intégré à la société, soit un mendiant, bien souvent aveugle.

Il faut cependant souligner une bizarrerie de la vie musicale française au XVIIIème siècle, sous Louis XV (entre 1725 et 1765), à savoir l'engouement que manifeste à cette époque l'aristocratie parisienne pour la vielle à roue. Ce phénomène est relié au mythe arcadien : la recherche d'un paradis perdu, du monde merveilleux des origines. Les aristocrates déguisés en fermiers organisent des fêtes champêtres et pastorales dans lesquelles la vielle représente l'instrument typique du monde campagnard.

Dans le cloisonnement de somptueux palais, on accompagne la danse de musiques villageoises et pastorales, jouées sur des instruments considérés comme "populaires", n'ayant pourtant que peu en commun avec leurs modèles originels. On compose durant cette courte période de rayonnement davantage de pièces pour vielle à roue et musette de cour que, par exemple, pour violoncelle ou hautbois.

Après cette parenthèse aristocratique, la vielle continue son chemin avec les plus démunis. C'est ainsi qu'on trouve énormément de tableaux représentant des vielleux aveugles ou des enfants jouant de la vielle accompagnés d'un chien qui danse.

Une autre particularité dans l'histoire de la vielle est l'histoire des petits savoyards durant le XVIIIème siècle. Les enfants de Savoie partaient en hiver rejoindre les villes pour gagner de l'argent en jouant de la musique avec leur vielle et pour y effectuer des petits travaux comme le ramonage, etc.... Ils étaient fréquemment accompagnés d'une marmotte (enfants montreurs de marmotte).

C'est ainsi que de ménestrels en amateurs, de mendiants en vagabonds, de villages en bourgades, la vielle est arrivée jusqu'au début du XXème siècle, supplantée bien souvent par le violon créé au XVIème siècle et plus tard, au XIXème siècle, par l'accordéon.

En Wallonie, et dans le wallon, elle est citée au XVIIIème siècle (dictionnaires wallons de Villers et de Haust).

Depuis une bonne cinquantaine d'années, l'instrument a repris des lettres de noblesse grâce au développement de la musique folklorique et c'est pourquoi, on trouve encore beaucoup de facteurs de vielles, voire de plus en plus.

Evolution de l'instrument.

L'organistrum devint symphonia puis chiffonie.

Au XIVe siècle, le chien fait son apparition, et est utilisé uniquement pour les danses dans les campagnes. Le nombre de cordes augmente également pour passer à cinq voire six (deux cordes mélodiques, une corde rythmique, deux à trois bourdons) ; quant à la tessiture, elle évolue petit à petit d'une octave diatonique vers deux chromatiques complètes. C'est la naissance de la vielle.

Henri Baton, luthier à Versailles au XVIIIème siècle, peut être considéré comme le facteur de vielle ayant révolutionné la lutherie de cet instrument. Les luths et les guitares ne trouvant plus beaucoup d'acquéreurs à cette époque, son stock d'instruments augmentait. C'est ainsi qu'en 1716, il décida de changer la forme des vielles, jusqu'ici trapézoïdales et trilobées, le plus souvent, et de fabriquer des vielles à partir de caisses de guitares. Il créa ainsi la vielle à fond plat.

Ensuite, vers 1720, il en fit autant avec un corps de luth afin d'obtenir un son plus moelleux: ce fut la naissance de la vielle ronde.Ces deux formes de vielles sont celles qui sont le plus souvent utilisées actuellement.

C'est Henri Baton aussi, relayé ensuite par son fils Charles, qui décida d'insérer sur l'instrument des marqueteries, des pièces en nacre et en ivoire, des têtes sculptées, un capodastre et des cordes sympathiques. La vielle à roue fut ainsi portée à une apogée technique et esthétique sans précédent dans son histoire.
A cette époque, cela permit à la vielle de faire face aux autres instruments et d'être admise dans les concerts. Ainsi des compositeurs du XVIIIème siècle tels Michel Corrette (1707-1795), Esprit-Philippe Chédeville (1696-1762), Nicolas Chédeville (1705-1782), lui consacrèrent des œuvres. Nicolas Chédeville arrangea même les quatre saisons de Vivaldi pour qu'elles soient jouées par la vielle.

Les dernières évolutions de la vielle datent de quelques années seulement, on trouve ainsi des vielles électro-acoustiques au son très synthétique et des vielles altos au son plus grave.

Bibliographie.

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